LA PETITE MADELEINE de Marie-Victoire: Beurk, mot technique

Des goûts et des couleurs, on ne discute pas. Des dégoûts non plus… à chacun son beurk, à chacun ses gourmandises. La fraise tagada par exemple, sous quelle bannière la placez-vous ? D’aucuns traverseraient le Channel à la nage pour en croquer une (mâchonner serait plus exact). Pour ma part je préfère jeûner que manger de la chimie fluorescente.

Des dégoûts et des couleurs. C’est l’histoire d’une ânesse très gourmande qui a de la suite dans les idées car elle a pris  pour habitude d’aller au bistrot. C’est un petit bar à Guzet-Neige en Ariège. Notre ânesse ne s’approche jamais du comptoir pour demander un canon bien mousseux ou un petit coup de rouge, mais elle fait le tour des tables pour… déguster les mégots qui traînent dans les cendriers. Comme la porte d’entrée de cet estaminet du grand sud s’ouvre vers l’extérieur, il y a les ânes à deux pattes (les vous et moi) qui s’escriment à pousser la porte pour entrer, et notre amie plus maligne qui abaisse la poignée puis la tire grâce à ses babines, avant de glisser un sabot dans l’entrebaillement puis la tête pour mieux tirer en grand le battant et poser enfin son premier sabot sur le parquet du bistrot. Cette belle histoire n’est plus car les lois de la république ont changé : on ne fume plus ‘dedans’, alors l’ânesse ne va plus au bistrot et le chiffre d’affaires du bistrotier a dégringolé.

Des dégoûts et des couleurs. Un peu plus loin dans l’espace et dans le temps, dans la province du Jiangxi en Chine, monsieur Musheng, 66 ans et peut-être toutes ses dents (l’histoire ne le dit pas), mange toujours des grenouilles vivantes et des rats. Cela dure depuis quarante ans. Il est persuadé que ce régime alimentaire lui a permis d’éviter les complaintes intestinales, et de rester fort comme Popeye. Finalement, je mangerais bien une fraise tagada…

Marie-Victoire BERGOT. La Radio du Goût