POMME DE TERRE PRIMEUR

Le printemps nous annonce avec gaîté le retour des pommes de terre primeurs que les producteurs se sont attachés à cultiver avec un soin tout particulier.

En début de campagne, les tubercules sont ramassés à la main. Aussitôt, ils sont conditionnés et expédiés sur les points de vente. Car de tous les coins de France, elles sont attendues par les connaisseurs et les gourmets qui se les disputent dès leur apparition sur les étals. Leur fragilité, qui accroît leurs qualités gustatives et nutritionnelles, peut parfois se retourner contre elles ! En effet, elle rend leur commercialisation plus délicate. Et pour le consommateur non averti, les primeurs peuvent

décevoir si elle ne sont pas dégustées très vite après l’achat.

Alors, pour apprécier les pommes de terre primeurs à leur juste valeur, choisissons-les toutes fraîches et accordons-leur un traitement de faveur en les protégeant de la lumière et en ne les conservant pas plus de 3 jours.

Les pommes de terre primeurs sont reconnaissables avant tout à leur peau si fine que nous n’avons pas besoin de l’éplucher. Elles sont en cela très séduisantes car il suffit juste de les frotter rapidement avant de les préparer en toute simplicité, à la vapeur ou rissolées.

Le gain de temps associé à la facilité de préparation fait des pommes de terre primeurs un légume apprécié de tous les consommateurs.

Et de pouvoir garder leur peau leur confère des qualités nutritionnelles que l’on a tendance à oublier.

Rappelons que toutes les pommes de terre présentent un profil nutritionnel remarquable et trouvent leur place dans les recommandations actuelles en matière de nutrition.

En matière de vitamines, les modes de préparation et de cuisson ont une influence déterminante sur la teneur finale de vitamine C. La préservation de cette vitamine nécessite une cuisson brève, de ne pas peler les tubercules et de ne pas les conserver trop longtemps. Une prescription qui sied à merveille à ce légume de printemps.

Les pommes de terre primeurs aiment les zones littorales bénéficiant de microclimats dus à l’influence maritime, les sols sableux qui se réchauffent vite, les terres aérées par le vent du large riche en iode de l’Atlantique ou de la

Manche, ou encore les terres aux senteurs de garrigue, de pin ou de romarin.

Les premières primeurs françaises proviennent de la région des îles de Ré et de Noirmoutier.

Elles sont suivies par celles plantées en Bretagne, de la pointe de Brest à Roscoff, de Lannion à Paimpol et enfin de la région malouine.

Les primeurs du Sud qui préfèrent les terres du Gard, du Roussillon ou des environs de Cavaillon s’épanouissent à leur tour, rejointes par les primeurs de Marmande.

Enfin, les dernières arrivées sont originaires du Val de Saire, à la pointe du Cotentin.

Signes particuliers :

Peau : fine et même parfois « peleuse »

Couleur : claire et homogène

Forme : régulière

Chair : tendre

Goût : légèrement sucré

Signe particulier : riche en vitamine C

Nationalité : française

Saisonnalité : de fin avril au coeur de l’été

(source:CNIP)

Une histoire de pommes de terre…

Immuable, comme tous les rituels, il revenait chaque année. A peine l’espoir du printemps était-il esquissé à d’imperceptibles signes et parce que février était là, mon père descendait en sa cave pour inspecter ses pommes de terre, dont la plupart germait déjà. Il les examinait, les soupesait, les triait et – pourquoi celles-là et pas d’autres ?- en retenait quelques-unes qu’il couchait soigneusement dans des cagettes de bois dont il avait recouvert le fond de papier journal. Précieuses semences ! Bintjes, rosabelles, rattes, belles de Fontenay, quenelles… sont les noms qui remontent à la surface de ma mémoire. Et je me moquais gentiment de lui. Comment pouvait-il accorder autant d’importance à de vulgaires patates ?

Quand le sol était suffisamment réchauffé, il savait déjà dans quelle parcelle du jardin il allait les planter, religieusement. Mais d’abord, il lui fallait retourner la terre, à l’aide de sa vieille, solide et fidèle bêche. Le signal était déclenché par l’explosion des fleurs graciles et fugaces des pêchers qui brandissaient leurs branches légères sur un fond de ciel bleu, borné au loin par les crêtes encore enneigées du Jura. Les mottes de lourde terre brune luisaient sous le soleil prometteur malgré l’inévitable air de bise qui s’entêtait. Ensuite, il s’agissait de les casser, ces mottes. Rendre la terre la plus fine possible. Eradiquer au passage le moindre rhizome de chiendent, le moindre brin d’herbe, le plus petit caillou. Puis creuser un profond sillon surplombé d’un monticule rectiligne. Enfin, déposer à intervalles réguliers, délicatement, comme en un berceau, les élues pleines de promesses dont les germes se dressaient d
éjà vers la lumière. Et les recouvrir avec la ter
re nourricière, en traçant un nouveau sillon, exactement parallèle au précédent. Ainsi de suite, jusqu’à ce que les cagettes soient vides.

Mon père s’arrêtait enfin, contemplant son oeuvre, éphémère et digne de tous les graphismes contemporains. Il passait les semaines suivantes à guetter et soigner les prémices de sa récolte. Que de travail pour les amener à maturité, et quelle humble patience ! Sarclage, binage, désherbage, buttage, arrosage, traitements préventifs – surtout ne pas laisser les ennemis doryphores s’installer. Ils étaient jolis, pourtant ! De vrais petits bijoux jaune crème striés de noir. Je le traitais d’assassin, de raciste même. Pourquoi ne pas réserver le même sort aux coccinelles ? Et il riait…

Que dire de la première poêlée de pommes de terre nouvelles ! Cette seule évocation me fait encore saliver. Minuscules, serrées dans un mélange de beurre fondu et d’huile qui moussait, délicatement rôties, elles fondaient dans la bouche, éphémères gourmandises, accompagnées d’une simple salade, nouvelle elle aussi, fraîche et croquante. Je ne connais rien de plus délicieux au monde !

Geneviève Biffiger (Lettre d’une auditrice de Radio France pour « Paroles d’enfance »)

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Les Petits Contes culinaires de Marc Veyrat