Une faille de l’espace temps, c’est tout ce qu’il nous aura fallu pour dévorer nos congénères avec application, délectation et selon un rituel que les archéologues n’arrivent pas à comprendre ni identifier. Cela se passe à Herxheim en Rhénanie-Palatinat, mais cela aurait tout aussi bien pu se passer devant notre porte.
Nous sommes en 5000 avant J.C., la période du Rubané, quand le Néolithique arrive en Europe (on s’arrête là pour l’érudition, car je tombe ensuite dans le trou noir de l’ignorance crasse). Nous habitons un joli hameau de quelques feux, vêtus de peaux de bêtes, le système pileux est généreux même sur les gambettes des dames. Nous vivons de la cueillette, de la chasse, et cultivons les mêmes travers de jalousie, haine, amour et peur que nos descendants. Que se passe-t-il dans notre petite tête pendant la trentaine d’années qui marque la fin puis la disparition de ce hameau ? Les archéologues s’interrogent encore.
En 1995, ceux-ci découvrent notre hameau : nos maisons sont entourées par une double série de fosses, creusées en plusieurs fois selon un tracé prédéfini. Au fond, des tas de crânes et d’os, enchevêtrés comme un jeu de mikado lancé avec adresse. Crânes et os correspondent à 400 ou 500 individus différents. Les restes d’un massacre ? Les laissés pour compte d’une bataille sanglante ? Le rituel funéraire est très particulier car les corps sont démembrés, découpés, et les os cassés.
Dix ans plus tard, les fouilles reprennent dans notre hameau. Et là … l’analyse en laboratoire des p’tits bouts entassés ne laisse aucun doute : les corps ont été dévorés par des êtres humains ! L’anthropologue Bruno Boulestin livre son analyse (pauvres de nous) : « les squelettes ont d’abord subi des préparations de boucherie. Des traces de découpe sur la plupart des os, la ‘levée de l’échine’, où l’on sépare les côtes de la colonne vertébrale, l’écorchement des crânes depuis la racine du nez jusqu’à la nuque, etc. Ensuite les os et les crânes ont été fracturés, et ce d’autant plus qu’ils contenaient de la moelle. Certains ont même été rongés, sucés. » D’où venaient ces gens ? De quel rituel s’agissait-il ? Peut-être vaut-il mieux ne jamais le savoir, nous pouvons être si monstrueux. Si vous êtes curieux de cette histoire très très gore, allez jeter un œil que le site des fouilles, mais ne me demandez pas de traduction, j’en suis plus qu’incapable ! Ma connaissance de la langue allemande se limite à une douzaine de mots parmi lesquels danke, ausfahrt, frühstück et schlakbaum (passage à niveau, qui se dit d’ailleurs bahnübergang, merci les dictionnaires en ligne !). Lien: http://www.projekt-herxheim.de/
Marie-Victoire BERGOT. laradiodugout.fr