La Cuisine au féminin

Executive Sous Chef du Sofitel Metropole à Hanoi, Van Nguyen Thanh est ce que l’on pourrait nommer une «maîtresse femme», qui représente à l’heure actuelle une des personnes qui ont le plus de pouvoir en cuisine au Viet Nam.

Déjà, par le lieu où elle exerce : le Métropole, un hôtel chargé d’histoire, entré depuis quelques mois dans la nouvelle collection «Legend Hôtels» du groupe ACCOR.

Madame Van Nguyen Thanh © SofitelMetropole

Madame Van Nguyen Thanh © SofitelMetropole

Aux côtés de l’Executive Chef André Bosia, elle gère une équipe de 100 personnes au niveau des trois restaurants (français, vietnamien italien), le Deli shop et la cafétéria.

Portrait et interview d’une professionnelle au parcours hors normes.

MAP : Madame Van Nguyen Thanh, comment êtes vous arrivée à la cuisine et pourquoi ?

Je suis venue travailler dans la cuisine du Metropole en 1992 en tant qu’interprète, car le chef était français et les employés ne comprenaient pas sa langue (le Metropole était presque le premier hôtel ayant une cuisine française à cette époque). Toutes les techniques de cuissons, les ingrédients étaient entièrement inconnus pour les cuisiniers. Ils devaient donc apprendre de A à Z et il fallait avoir une interprète pour les aider. Voilà pourquoi j’étais là.

MAP : Comment s’est passé votre évolution de carrière ?

Très difficile, plus difficile que pour les autres car je n’avais pas appris la cuisine avant de venir au Metropole. En traduisant les termes techniques, je devais les apprendre et les comprendre puis les appliquer pour les expliquer à fond aux cuisiniers. J’ai alors appris à faire la cuisine par cette voie.

MAP : Une femme qui dirige en cuisine, comment est-ce accepté au Viet Nam ?

Ici, dans les restaurant familiaux, privés et de petite taille, il y a beaucoup de femmes dirigeantes. Mais dans des grands hôtels comme le nôtre, je n’en vois pas beaucoup. Mais je pense que les gens autour de moi m’ont beaucoup appréciée et m’acceptent facilement. Je les ai beaucoup aidés depuis leurs débuts et continue toujours de le faire. Je ne vois pas de barrières sur mon chemin.

MAP : Pour vous, quel est le plus que les femmes peuvent apporter en cuisine ?

L’organisation / les détails / l’imagination, la création avec une touche féminine / l’attention au coût…

MAP : Votre regard sur le métier ici par rapport à d’autres pays ?

Au Viet Nam, nous avons plus de femmes cuisinières. Par contre, c’est plus difficile pour elles d’avoir des postes importants car elles doivent souvent consacrer beaucoup de temps à leur foyer. Chez nous, la femme est le cœur, l’âme de la famille. Cuisinier est un métier difficile qui demande de la mettre certaines fois de côté, de faire passer les soucis de la maison derrière les commandes des clients…

Pour une femme, c’est quand même assez difficile si elle n’a pas un énorme support de la part de son partenaire et de son entourage familial.

Même si comme l’explique Madame Nguyen Thanh, il faut un soutien familial pour exercer ce métier, entre les femmes chefs au Viet Nam et celles, par exemple du Japon, le delta est grand !

Car même si nous sommes Asie, il y ne faut pas confondre la culture de ces deux pays quant au regard sur la féminité en cuisine.

Le chef Dominique Corby, installé à Tokyo depuis une quinzaine d’années, en a témoigné: «Ici, pour des postes dans des restaurants ou des hôtels, je ne crois pas qu’il y ait beaucoup d’évolution sur ce sujet, un chef de cuisine doit être un homme. Je ne prends pas cela pour de la misogynie, mais le système n’est pas organisé pour qu’une femme travaille : il n’y a pas de crèches, de baby sitter…c’est très différent de la France ou d’autres pays occidentaux. C’est très difficile pour elles de concilier vie professionnelle et vie personnelle.».

Et pourtant…lors du festival «Les Dames de la Rose» qu’il a organisé en pays nippon, réunissant trois chefs : Andrée Rosier (première femme Meilleur Ouvrier de France), Flora Mikula installée à Paris, Laurence Salomon à Annecy, Meryem à Casablanca et la «vigneronne» Valérie Riboud (vins de Provence). Les japonais, ravis, les ont attentivement observées et écoutées. Aussi très étonnés qu’elles soient chefs d’entreprises !

Le site de l’hôtel «Sofitel Metropole» d’Hanoï

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2 Responses

  1. tbourgeon dit :

    Merci Nouche,
    voila un commentaire qui nous encourage à faire encore plus…du bon!
    Amitiés
    thierry.bourgeon@laradiodugout.fr

  2. NOUCHE dit :

    Bonjour,
    j’ai beaucoup aimé cette invitation au voyage. Très joli travail. Pour une fois que l’on échappe aux articles copiés-collés des blogs gastro. Cela fait du bien.
    Continuez à nous offrir ces vrais contenus sur le goût. Je sais que cela demande beaucoup de travail mais…quel plaisir.
    Bien amicalement.