Quatre grands crus majeurs
En matière d’huitres, on trouve en Normandie quatre grands crus d’exception. En demi -cercle autour de la Manche et du Calvados, de l’ouest à l’est, en premier lieu le domaine des huitres de la Côte Ouest, puis de Saint-Vaast-La-Hougue, ensuite d’Isigny-sur-mer et enfin le domaine de la Côte de Nacre mais il en est des huitres comme de tous les autres produits de grande qualité. Prenons les grands vins par exemple, ceux de Bordeaux ou de Bourgogne, les vins de Champagne ou d’Alsace et tous les autres, les noms les plus prestigieux, les domaines les plus rares sont composés de parcelles, souvent de modestes superficies, tel un puzzle complexe dont chaque pièce, par la composition de sa terre, son acidité, sa pente, son ensoleillement, apporte sa touche la plus personnelle en s’insérant parfaitement dans un ensemble précis et cohérent.
Il en va de même dans le domaine ostréicole des huitres de Normandie. D’une extrémité à l’autre de la Côte Ouest ou du périmètre d’Isigny-sur-mer, par exemple, le connaisseur notera des différences, des singularités, des saveurs qui se développent, d’autres qui s’atténuent.
Ajoutons à cela, la griffe humaine, les compétences, la passion de ces travailleurs de la mer. Car faire une huitre, depuis le naissain jusqu’au conditionnement final en bourriche, est un travail incessant d’une grande rigueur et il faut les manipuler à la main, une par une, ces fameuses « poches » métalliques de vingt kilos et plus. Les jeunes huitres vont croitre dix-huit mois en pleine mer. Ce brassage vigoureux va leur fournir tout le plancton indispensable à leur croissance. Viendra ensuite, une remontée vers la partie haute de l’estran (L’estran est la partie du littoral située entre les niveaux connus des plus hautes et des plus basses mers.) ainsi à chaque marée, les huitres s’ouvrent et se ferment, ce qui favorise leur musculation et leur oxygénation. Le travail est donc rude et peut être réduit à néant car la nature est ici la seule ou presque à pouvoir dire son dernier mot. Et les ostréiculteurs les plus âgés se souviennent des années difficiles.
Sur la façade océanique de la Manche, battue par de puissants courants de marée et les embruns du large, de Portbail à Granville, un grand cru d’exception, il s’agit de l’huitre de la Côte Ouest à la saveur parfumée et corsée. C’est l’huitre de Pleine-mer. N’oublions que les marées de Normandie sont les plus fortes d’Europe en amplitude. (Jusqu’à 14 mètres d’amplitude et 6 kilomètres d’estran).
Les images de ce reportage ont été faites à Blainville-sur-mer lors de la visite des installations et des parcs en compagnie de Louis Teyssier de la GAEC Thalassa Distribution accompagné de Christophe Charbonnier, deux grands passionnés de la mer, intarissables sur le métier. Remontons à présent vers Saint-Vaast-la-Hougue, on ne peut plus au nord-est de la Manche, le plus ancien domaine de la région dont l’origine remonte à la fin du XIX° siècle. Dans les années 1960, les huitres sont placées dans des « poches » disposées désormais sur des tables métalliques à une quarantaine de centimètres du sol. Cette technique, nouvelle, augmente la longévité des huitres qui « travaillent » au rythme des marées et se bonifient. L’huitre de Saint-Vaast fait le bonheur des gourmets : iodée et charnue, réputée pour son goût de noisette, merveilleux assemblage des qualités des autres crus.
Un peu plus bas, le domaine de l’huitre d’ Isigny-sur-mer et de Grandcamp-Maisy, bordée par Utah Beach et la baie des Veys, le fruit est charnu, doux et croquant à la fois et on le réservera pour les fines préparations culinaires.
Enfin , l’huitre se plait aussi dans le Calvados avec la Côte de Nacre. Cette huitre est la petite dernière des crus ostréicoles de Normandie, originaire de l’est d’Arromanches dont les courants sont si puissants qu’ils favorisent une croissance et un développement d’un goût exceptionnel. le site ostréicole de Meuvaines-Asnelles a été créé au début des années 1990. Au total, le domaine ostréicole normand couvre aujourd’hui environ 1100 hectares.
Joli reportage sur cette escapade si vivifiante. Et un grand merci pour le clin d’œil final.