C’est en 1829 que Pierre-Jean Calmels, alors forgeron au village de Laguiole a bricolé pour les besoins des paysans du coin, un couteau utilisable tous les jours et qui s’inspirait à la fois de la navaja espagnole avec son manche très cambré et du couteau utilisé localement, mi outil, mi arme, avec une lame fixe très rigide et un poinçon.
Les matériaux utilisés pour faire le manche étaient ceux fournis par les bêtes, c’est à dire l’os et la corne. A la fin du XIXème siècle ce couteau était uniquement connu des aveyronnais. Sa diffusion était donc confidentielle. Ce sont les guerres mondiales et l’exode rural qui l’ont fait voyager. Mais parallèlement elles ont entraîné le départ des couteliers de Laguiole vers la capitale de la coutellerie, Thiers.
Il fallut attendre 1987 pour que Gérard Boissens décide de relancer sur son terroir d’origine la fabrication du couteau Laguiole. Il entreprit de bâtir la Forge de Laguiole. Au départ la fabrication a été de quelques dizaines de pièces par semaine. Voulant symboliser le renouveau du couteau Laguiole en alliant tradition et modernité il sollicita le célèbre designer Philippe Starck pour créer un atelier aux formes futuristes, très transparentes. Le symbole en est d’ailleurs une immense lame qui sort du toit. La communication, relayée par les aveyronnais disséminés à Paris et dans le reste de la France a eu pour effet de faire s’envoler la production.
Mais ici pas de stakhanovisme,l’objectif n’est pas de produire plus et plus vite mais de réaliser à chaque fois un produit parfait. Les modèles traditionnels se caractérisent par une abeille massive, ciselée à la main, faisant de chaque couteau un produit unique.
Des fabrications spéciales sont réalisées pour des grands noms comme Hermès ou Sonia Ryckiel ainsi que pour bon nombre de restaurants étoilés. Tout récemment c’est la Société d’Exploitation de la Tour Eiffel qui pour fêter les 120 ans de la Grande Dame a fait réaliser deux séries exceptionnelles de couteaux fabriqués à partir de fer puddlé* issu de cornières démontées au sommet de la Tour.
Cette renommée est arrivée jusqu’au plus haut niveau de l’Etat et le Laguiole constitue le cadeau de la République Française à ses hôtes de marque. Cette réputation a d’ailleurs largement dépassé nos frontières. A l’étranger, les Emirats Arabes Unis sont des clients assidus avec des modèles très précieux. Pour toutes ces fabrications de prestige très personnalisées, entre en scène Virgilio Muñoz, Meilleur Ouvrier de France 1986.
Mais quelque soit le modèle de votre choix, standard ou de prestige, n’oubliez jamais : un Laguiole ne se lave pas, il s’essuie.
Les différentes phases de la fabrication :
1 / la métallurgie, c’est-à-dire le travail du métal (acier chirurgical 440 inaltérable ou XC 75 oxydable), la découpe, l’estampage, le marquage, la forge de la lame, la trame de la lame.
2/ le montage, qui est réalisé manuellement par assemblage de toutes les pièces de manière à obtenir un couteau qui est fini. Cette étape comporte la sculpture du manche et le réglage du couteau.
3/ le polissage. Il s’agit de passer le couteau entre des cotons pour révéler la noblesse du manche que ce soit la corne ou les différents bois. Cette étape comporte également l’affûtage de la lame. Le couteau est alors pratiquement prêt. Il est alors nettoyé, passé au contrôle qualité et expédié.
Jean-Claude Boudet/ mars 2019/laradiodugout.fr
* fer puddlé : procédé de brassage qui lui confère d’exceptionnelles qualités de souplesse et de résistance
Forge de Laguiole – Tel 05 65 48 43 34 – www.forge-de-laguiole.com