AIZPITARTE Inaki ( Le Chateaubriand – Paris 75011 )

Six ans qu’Inaki Aizpitarte traîne sa carcasse dans les cuisines parisiennes. Et cette année, après deux ouvertures de restaurants ébouriffants, c’est l’explosion d’un grand chef…

Si l’Obs élisait son homme de l’année, nul doute qu’en 2006, dans le monde de la jeune cuisine parisienne, Inaki Aizpitarte serait, pour nous, le personnage le plus emblématique.

Depuis ses débuts montmartrois à « la Famille », le Basque dégingandé, en dépit de son air dans la lune, a imposé une manière de cuisiner en plein dans l’air du temps. Un rapport à l’instant, à l’instinct, au produit brut rapidement sublimé, qui n’appartient qu’à lui. Ou éventuellement, à une génération qui en aurait ras-le-bol des camisoles de force de la « grande cuisine gastronomique ». Difficile d’imaginer Inaki s’accommodant des contraintes d’une maison étoilée, ou réduisant sa liberté à quelques plats de répertoire – fussent-ils d’auteur. « Mon rêve secret a toujours été d’ouvrir un bistrot typiquement parisien », nous disait-il alors qu’avec son complice Laurent Chareau, rencontré au Café des Délices, il faisait les beaux jours du Transversal, la table du Mac/Val de Vitry dont il est toujours, dans l’ombre, l’un des agitateurs.

Et il faut le voir, heureux comme un gosse qui aurait enfin son jouet, s’activer, plein d’allant, fonçant droit au but dans son nouveau Châteaubriand. L’adresse historique du Paris bistrotier n’a apparemment pas changé – toujours la même déco 1930 nostalgico-bordélique.

Seulement, Inaki rôde aujourd’hui une formule qu’il a lui-même portée sur les fonts baptismaux : entre bistrot du midi, bar à tapas non stop et néo-gastro du soir. Le midi voit donc converger les habitués d’un quartier très actif, en quête de saveurs dans une formule rapide et pas chère (13 euros !). Le soir, la carte très courte (trois entrées, trois plats, trois desserts) annonce la couleur : Iñaki fait de l’Aizpitarte. C’est-à-dire du décalé et de l’innovant. Pour 36 euros, une ventrèche de thon soulignée par une émulsion de betterave et des grains de grenade éclatant sous la langue, un tartare de boeuf coupé en gros dés avec oeuf de caille, émulsion de céleri et vinaigrette de cacahuète, ou encore une poitrine de cochon accompagnée d’un risotto de céleri et d’un coulis de réglisse. Une cuisine vive, aiguë, d’un raffinement brut de décoffrage. Par l’homme de l’année, on vous le dit.

(Portrait réalisé avec la collaboration du Nouvel Observateur et Omnivore)

Le Châteaubriand

129, avenue Parmentier

75011 Paris

01.43.57.45.95

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