Le Théâtre d’agriculture et mesnage des champs est l’oeuvre d’Olivier de Serres (1539-1619), gentilhomme protestant du Vivarais (Villeneuve-de-Berg en Ardèche). Ce traité d’agriculture est le fruit des recherches entreprises par l’agronome sur sa propre exploitation (Le Pradel à côté de Villeneuve où il mourut) à partir de 1559. L’aspect novateur du Théâtre tient au caractère scientifique de la démarche de son auteur qui, bien que connaissant l’apport des antiques et de ses contemporains, réalisa ses propres expérimentations.
L’ouvrage est divisé en huit « lieux », où sont exposés l’ensemble des pratiques agronomiques et horticoles, et fait part d’un certain nombre d’innovations telles que l’utilisation méthodique des amendements, le labourage profond, la méthode de l’assolement triennal ou la culture de végétaux nouvellement introduits (pomme de terre, coton…ainsi que celle de la betterave sucrière, du houblon, de la garance, du maïs…).
Le Théâtre d’agriculture, quelque peu oublié après la révocation de l’Édit de Nantes (1685), connaîtra cependant une fortune critique exceptionnelle et vingt-quatre éditions successives. Cette célébrité de l’ouvrage est due notamment, à l’avance technologique des méthodes culturales présentées, que seul le XXe siècle parviendra à surpasser, et à l’importance du lectorat potentiel que représente l’ensemble des propriétaires et exploitants agricoles.
La publication du traité d’Olivier de Serres s’inscrit dans le cadre politique d’une volonté de relance de l’agriculture dès les premières années du règne d’Henri IV. L’ouvrage, en abordant la question de la culture du mûrier blanc et la sériciculture, participe également à la politique de la soie que veut promouvoir le roi pour lutter contre l’importation de soieries étrangères. En faisant part de la façon de réaliser les parterres dits « à la nouvelle mode » inaugurés pour les jardins royaux, le Théâtre d’agriculture est également devenu un ouvrage de référence en matière d’histoire des jardins.
D’après Frédéric Sichet, historien de l’art
Illustration: O. de Serres. Gravure d’après le portrait original peint par son fils. Paris, Bibliothèque nationale de France
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