Lettre à Eric Westermann
Mon cher Eric,
Au jeu des 7 familles de Chefs tu as vraiment tiré la bonne carte.
Dans la famille Westermann, le grand-père, Jean, était peintre en bâtiment mais superbe cuisinier. Mamie la grand-mère maternelle t’a élevée dans le respect des bonnes choses. Ton père Antoine, triple étoilé a fait du Buerehiesel, la Maison des paysans, un temple de la gastronomie alsacienne avant d’aller prendre en mains Drouant à Paris.
Et te voilà, toi le « fils à papa » fière de l’être, parti à la conquête de ta propre destinée.
Tu nous a tous épaté quand, à 31 ans, tu as toi-même souhaité la disparition des trois étoiles du Buerehiesel, pour bien marquer la passation de pouvoir entre ton père et toi.
Sacré pari pour un jeune chef formé ici même, mais aussi, il est vrai, au Palais à Biarritz, au Crillon parisien chez Christian Constant, chez Jacques Thorel à l’Auberge Bretonne de la Roche Bernard et chez Lameloise à Chagny. De jolis atouts déjà dans ton jeu… Jacques Thorel, tu n’es pas près de l’oublier « un sacré bonhomme, super attachant et des produits au top », Jacques Lameloise non plus. Et cette chance inouïe, lorsque de retour à la maison « les choses, dis-tu, vont s’organiser d’elles même, quant au fil des départs, des remplacements, devenu le « bouche-trou » tu vas finir, le 2 février 2007, par devenir Le Chef. Tu te souviens : « C’était un vendredi, j’étais invité par un journaliste de France 3 pour parler de la transmission. J’ai réalisé, d’un seul coup. J’ai paniqué pour six couverts. Le père, lui, était en Asie ».Depuis, Viviane, ta maman a pris sa retraite, papa Antoine gère son « Vieil Ami €
» et son « Drouant » de Paris, conseillant le nouveau Gho du S
ofitel strasbourgeois et le « Da Guincho » au Portugal.
Et te voilà menant ta « révolution du palais » avec un menu déjeuner-affaire à 35 euros. « Je propose également un menu à 65 euros (entrée, poisson, viande, dessert), et le menu dégustation est à 108 Euros au lieu de 158 ! ».Révolution de Palais également avec le nombre des bouteilles en cave divisé par deux, et l’équipe réduite pratiquement de moitié.
Mais le noyau dur est resté : Fabrice Thouret, le second de cuisine, amoureux de son Haut-Doubs natal, Jean-Marc Zimmermann, le sommelier aux 29 ans de maison, qui a connu l’ascension vers les étoiles et qui met aujourd’hui son talent à ton service. Belle équipe pour un bien beau projet : celui, en remettant les compteurs à zéro, d’offrir toujours du plaisir et de la qualité. Il y a les « classiques Buerehiesel » : Schniederspaetle (petits raviolis) et cuisses de grenouille poêlées au cerfeuil, ou la Poulette patte noire entière comme un baeckeoffe, aux pommes de terre, artichauts, citron confit et romarin, mais que dire de cette poitrine de cochon fermier confite oignons grelots et carottes fanes, batavia à l’ail grillé ! J’en passe et des meilleurs, comme en bouquet final ce soufflé et sorbet au pamplemousse, granité au Campari
Merci encore Eric pour cette jeune invention, cette cuisine enthousiaste dans ce cadre magnifique mais désormais accessible qui a fait dire à cette nouvelle cliente : »On sait maintenant que l’on peut venir ici pour se régaler et sans se mettre obligatoirement sur son 31 ! »
La partie continue. Elle promet un beau jeu : celui du valet devenu roi!
Thierry Bourgeon. (Septembre 2007)
Eric Westermann au micro de Thierry Bourgeon.